“Je veux passer à Scrum, quel outils tu recommandes ?”

Que de conceptions à revoir dans ces quelques mots !

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Tout d’abord, personne ne veut “passer à Scrum”.

Améliorer le temps de livraison, améliorer la communication, avoir une meilleure vision sur l’avancement oui. “Passer à Scrum” non.

Ou alors c’est un “édit du roi” qui force le passage à la méthode, une contrainte achat, une réorganisation, un souhait pieux. Rien de tout cela n’est une méthode de management, encore moins pour une méthode qui se dit “Agile”.

Le Manifeste pour le Développement Agile dit qu’on parle de collaboration et de personnes, pas d’outils, méthodes, contrats…

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Ensuite, Scrum n’est pas un outil, n’est pas empêché par de mauvais outils, et n’est pas sublimé par de bons outils.

Le coeur est de revoir régulièrement comment on travaille ensemble : ce qui est pénible doit se simplifier, être contourné ou disparaître, et ça vaut le coup de regarder ce qui marche bien pour répliquer le succès si possible.

Acheter un outil avec des données captives et une licence sur longtemps, c’est perdre cette flexibilité.

Si le coût de passage est faible ET que le coût d’en sortir serait faible : essayez-le ! Peut-être que ça marchera.

Mais ne faites pas de choix irrévocable, c’est anti Agile.

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Bref, voilà ce que je recommande : le meilleur substitut à “un Vrai Scrum” que vous pourrez trouver, c’est de parler à l’équipe projet étendue : l’équipe, les patrons, les gens qui interagissent avec. Demandez-leur ce qu’ils veulent, comment ils aiment travailler et communiquer, et prévenez-les qu’on leur demandera une implication différente dans le suivi et les interactions.

Même votre GPS sait que parfois il faut recalculer le trajet en cours de route. Ne soyez pas plus bête que votre GPS.

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Enfin, je ne pense pas qu’une stratégie top-down fonctionne bien pour transformer et continuer quoi que ce soit.

Ici, X sera “Scrum” dans la bouche des gens mais “Agile” dans leur esprit. Ou toute méthode organisationnelle, réorga etc.

Quand chaque N+1 (leader local) a sensibilisé ses équipes au besoin X et son importance, il a commencé la transition culturelle. Ses équipes et lui permettront alors, par opposition ou par exemple, de fournir un retour d’expérience intéressant aux N+2, aux équipes voisines etc.

Cloisonner le X à un “département X”, une “équipe de X”, un rôle “responsable X”… est le meilleur moyen de créer un “eux et nous”, de faire passer les “X” pour des gens pénibles qui empêchent les autres de travailler et qui se drapent dans une aura indûe de “dernière bêtise à la mode qu’un escroc a réussi à vendre aux patrons et pour lesquels on vient probablement de dépenser dix fois l’argent qui nous aurait permis de sortir la tête de l’eau avec ne serait-ce qu’un stagiaire de plus”.

Une démarche bottom-up, grassroot me semble alors indispensable pour tout projet qui veut 1) se lancer et 2) durer.

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Et mon avis sur X ?

Par les individus et leurs expériences, dans les différentes équipes de mon entreprise, de mon client principal et de nos autres partenaires, nous sommes probablement à des étapes différentes sur la voie de sensibilisation ou de mise en place d’outils organiques de X :

  • on sent la friction sans pouvoir nommer le besoin de X
  • on fait déjà du X sans le savoir via nos outils et méthodes
  • on connaît le mot et les concepts du X
  • on connaît les outils leaders et on veut les mettre en place
  • on est en process de mise en place de X
  • nous sommes à l’état de l’art de X
  • nous dévions des enseignements du X car nous avons vu ses limites et le faisons à notre sauce

À l’inverse, ceux qui se présentent avec un département, un outil, une charte sans avoir la culture et la preuve que X est dans l’ADN de vos équipes, me semblent voués à l’échec

“Si vous voulez enterrer un problème, crééz une commission.”
Prouvez-moi que votre process n’est pas un Culte du Cargo.